samedi 24 septembre 2011

A Confederacy of Dunces

J'ai oublié à quelle occasion j'ai entendu parler de ce livre. Ce qui intrigue au delà du titre c'est la bien triste histoire de l'auteur qui n'a pas trouvé d'éditeur, qui s'est suicidé et qui a finalement eu le Pulitzer à titre posthume une vingtaine d'années plus tard. Plus exactement il avait contacté un critique littéraire new-yorkais très en vue qui l'a torturé mentalement en le félicitant pour son talent mais en lui demandant de réécrire encore et encore certains passages avant de s'en désintéresser. Et ce critique continue d'exercer, droit dans ses bottes, sans avoir, à ma connaissance, exprimé de regrets pour John Kennedy Toole.

L'incipit est vivant, plein de couleurs : je peux dire a posteriori que c'est déjà un échantillon très représentatif du style et du livre. Passons directement à la page 69 qui, dans mon édition (Penguin, 2000) est un véritable résumé de la posture sociale et intellectuelle du "héros", l'adipeux poète contestataire Ignatius J. Reilly. Si le résumé peut ne pas être aussi précis à la page 69 d'autres éditions, je peux confirmer que l'ensemble totalement cohérent et régulier ne change pas grand chose à la représentativité de cette page.

Si nous prenons la page 114 par exemple, il n'y est plus question d'avoir une vision précise du héros, du sens ou du manque de sens de sa vie. Le livre fourmille en effet de personnages excellemment dépeints, tout en traits saillants et en couleurs, comme le nègre Jones, exploité comme balayeur d'un bar louche parce qu'il n'a le choix qu'entre ça et le vagabondage qui mène direct en prison. On retrouve à la page 114 pour un élément clé du récit qui lui permet de ne pas être simplement un témoin joyeux et amusant, pour prendre une fonction qui le rapproche d'un chœur antique, mais avec une composante réellement active puisqu'il s'agit d'une révolution sournoise, une conspiration qui prend patience face à la tyrannie du plus fort là où le héros, impuissant, se fatigue à fustiger la conjuration des imbéciles.

Bref une aventure intellectuelle picaresque : un livre à découvrir à tout prix. Malheureusement je doute qu'une traduction, même bonne, lui fasse honneur.